22 décembre 2014

N° 134 - Raieboucléricalembour


   J'entends à la radio que l'étiquette du poisson va bientôt nous révéler en quelle mer et par quels fonds il a été pêché, avec quelle sorte de ligne ou de rets, puis le nom vernaculaire que lui donne le vulgum pecus, ainsi que les mots latins par lesquels le savant désigne, lui, ce piscem (piscis, piscis, piscem, piscis, pisci, pisce)1. Seul le thon sera plus long et la raie plus large que l'écriteau. 

   Je demanderai demain qu'on me mette en filets, selon l'arrivage, un beau zeus faber ou un neocyttus rhomboidalis. Je confesse avoir un faible pour ce poisson que mon saint patron d'apôtre, pauvre pêcheur, prit en ses filets et marqua de l'empreinte de son pouce.

  A propos, le successeur de Pierre est fidèle, lui, à son patron d'Assise qui, plutôt que pêcher, prêchait aux oiseaux et autres animaux. François s'est arrêté l'autre jour, place Saint-Pierre, devant un enfant qui pleurait au premier rang de la foule :
    - Pourquoi pleures-tu ? Quelle nouvelle ?
    - Le petit chien est mort.
    - Ne pleure plus : tu le retrouveras au paradis 2 !
   Nom d'un chien, je ne m'attendais pas à ce que le ciel ressemblât à l'arche de Noé… Mettons qu'on y tolère, et encore, les chiens du Saint-Bernard et de Saint-Hubert ; et va pour le roquet de saint Roch. Mais j'apprécierais quand même, une fois dans l'au-delà, de ne plus avoir à regarder où je mets le pied. Cela prête à réfléchir...

   A propos encore (tous les chemins mènent à Rom...). Un SDF causait hier dans un micro-trottoir. C'est de saison. Il rendait grâce aux bénévoles charitables qui viennent en aide aux sans-abris. Mais il raillait une association qui, dit-il, leur distribue... des porte-clés3 ! Diable, qu'allez-vous attacher à cet anneau, à part la clé des champs ? Votre clé-bard ? Allons, rêvez un peu, tournez la clé des songes et la clé du mystère. C'est Noël : voici la clé de sol des cantiques, la clé à bougies du sapin, la clé de voute céleste. C'est Noël : mettez le mot-clé #noel en mémoire sur la clé USB. Et puis "voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches", voici la clémentine, voilà la clématite... C'est Noël : les bergers se pressent à la crèche ; laissez-en la clé aux pâtres, avant la fuite en Egypte. Prenez plutôt les clés de saint Pierre (tiens, revoilà mon patron !) et celles du paradis. Mais attention : comme l'enfer, il est pavé de bonnes intentions. Et le pavé peut être gras et glissant : cave canem !



10 décembre 2014

N° 133 - Le chapitre des chapeaux *


J'entends à la radio qu'on va peut-être enfin se décider à bazarder les cartons à chapeaux des retraites faramineuses. Tiens, à propos de cartons : avec le froid qui s'installe on en voit d'autres (à pas chaud ceux-là...) sur les grilles de métro, sous les portes cochères.  Mais qu’y faire ? Au moins une petite chanson, ou un clip, en deux chapitres ?..

Au fait, le titre, “le chapitre des chapeaux” : il nous vient d’Hippocrate ! Du moins si l’on en croit Molière et son “Médecin malgré lui” (acte II, scène 2)...

Sur l'air d'une chanson de Guy Béart : "Le chapeau".


Ch. 1 - Le chapeau du PDG du CAC 40


C'est le plus beau jour de ma vie
Chers amis, prenons un pot
Demain je vais mener la grande vie :
Je prends ma retraite-chapeau.

Demain
Je vais chasser à courr', tiens
J'aurai des ch'vaux et des chiens
J'inviterai le gratin
De tout le bottin mondain
A des fêtes, des festins
Je suis   
Celui
Qui part en retraite aujourd'hui
Mais ne part pas sans biscuit.

C'est le plus beau jour de ma vie
Chers amis, prenons un pot
Demain je vais mener la grande vie
Grâce à ma retraite-chapeau.

Bingo
Avec mon joli magot 
J'irai jouer au casino
Tout l'été à Monaco
J'embarquerai des bimbos
Dans ma grande torpédo
Pour les
Mener
Sur mon yacht amarré à quai
Dans le port de Saint-Tropez.

C'est le plus beau jour de ma vie
J' pars en retraite-chapeau
Demain je vais mener la grande vie
La grande vie de château

Super !
Grand merci aux actionnaires
Qui ont boosté mon salaire 
Quand j'ai conduit le transfert
Du meilleur de nos affaires
A des usin's étrangères. 
En plus  
Quitus
Ils me gratifi'nt du bonus
D'une retraite-gibus !

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Ch. 2 - Le chapeau du SDF du 115


C'est le plus beau jour de ma vie
Y a d' la thun' dans mon chapeau !
Mesdam's, messieurs,  je vous en remercie
J' vais pouvoir manger un morceau.

C' matin
J'ai bien pris huit ou dix trains
Entre Etoile et Saint-Germain
J'ai servi mon baratin
Aux gens qui vont au turbin
En tendant mon galurin.
C'est lui 
C'est lui
Qui me fait gagner mon frichti
Et modèr' mon appétit.

C'est le plus beau jour de ma vie
Y a d' la thun' dans mon chapeau !
Mesdam's, messieurs,  je vous en remercie
J' vais pouvoir manger un morceau.

C' midi
Je vais ach'ter au Franprix
Un sandwich au salami
Une boit' de vach'-qui-rit
Plus un litron d' Kiravi
A partager entre amis
Si les
Poulets
Ne nous dis'nt pas de circuler
Plutôt que de picoler.

Ce n'était qu'un jour de ma vie
Y a plus d' thun' dans mon chapeau
C'est encore une journé' de finie
Après métro, goulot : dodo.

Pardon
Quand je rejoins les cartons
De ma planque sous le pont
En portant mon baluchon
Je rêve de la maison
Du gars qu'était mon patron
Le gros  
Fayot
Qui a transféré mon boulot 
Pour toucher sa retrait'-chapeau…


19 novembre 2014

N° 132 - Spatial assistance

Je n'entends plus à la radio beaucoup parler de Philae, ni de la comète Tchourioumov-Guérassimenko… Notre brave petit robot a chaviré dans un creux où le soleil ne peut l'atteindre ni recharger ses batteries. Il s'est engourdi, seul et épuisé, dans ce recoin sombre et glacial… Il reste une chance, une petite chance : quelqu'un peut l'aider, qu'il faut essayer de joindre à tout prix. Aussi compté-je (sic) sur chacun pour relayer et diffuser largement ce message, par tous les moyens possibles. Merci pour lui !



   Cher petit prince,

   Voilà bien soixante-dix ans que tu es retourné chez toi. Mais j'imagine que tu n'as pas vieilli puisque le temps, parait-il, s'écoule lentement quand on voyage d'une étoile à l'autre. Ne me demande pas pourquoi (même si je sais que tu ne renonces jamais à une question) : je ne saurais l'expliquer. C'est une chose que j'ai entendu dire au cinéma. Ah, le cinéma ? En deux mots ce sont des images, des dessins qui bougent, plus beaux encore que ceux de l'aviateur naufragé que tu avais rencontré sur la Terre, au milieu du désert.
   Petit prince, je t'écris pour te demander un service, sans trop savoir comment te faire parvenir ma lettre. J'en déposerai une copie au bord de l'étang, dans l'espoir qu'elle profite, elle aussi, d'une migration d'oiseaux sauvages ?

   Quand tu es venu, tu n'as vu qu'un seul homme ; mais tu as compris que nous sommes très nombreux sur Terre ! Il y a de plus en plus de petits rois autoritaires et de businessmen vaniteux, qui laissent de moins en moins de place aux fleurs et aux papillons. Il y a aussi beaucoup de géographes, qui savent maintenant où se trouvent toutes les rivières, toutes les mers, toutes les montagnes de la Terre. Au point qu'ils ont commencé à noter celles des autres planètes. Mais pour ça, tu le sais, ils ont besoin d'explorateurs. Et les businessmen aussi comptent sur les explorateurs, pour découvrir toujours des nouveaux trésors. Alors ils ont fourni aux ingénieurs de quoi construire une sorte d'avion qui puisse voler très longtemps, aller très loin sans tomber en panne, sans même un pilote à son bord.

   Il s'est envolé il y a dix ans, vers chez toi, vers les astéroïdes B 612, 325, 326, etc. Les ingénieurs l'ont appelé Rosetta, qui signifie petite rose. Peut-être pour saluer la tienne au passage ? Parfois, les ingénieurs sont comme ça… Les géographes, eux, veulent tout savoir d'une comète glacée qu'ils appellent Tchouri. Alors Rosetta, en tournant autour, y a fait descendre un petit robot, baptisé Philae. Il est à peu près gros comme ta caisse à mouton et il a trois pattes (c'est Philae qui a trois pattes). Je ne te dessinerai pas le robot, c'est un dessin beaucoup trop compliqué pour moi. Mais Tchouri n'est pas toute ronde comme ta planète. Elle est difforme et biscornue, pleine de bosses, et le pauvre Philae a trébuché en arrivant. Il est tellement de travers qu'il ne peut faire tout ce que réclament les géographes. 
   
   Pourrais-tu, s'il te plait, y faire un saut et le remettre sur pieds, dans un endroit où le soleil le réchauffe et lui redonne des forces ? Tu le verras alors remuer ses antennes, enfoncer des petites tiges dans le sol, diriger tout autour de lui des rayons de lumière et reprendre son travail d'explorateur. Ne crains rien, il ne te fera aucun mal.

   Petit prince, si tu le peux, ne tarde pas. Ne t'attarde pas non plus auprès de Philae. Dans quelques mois la comète s'approchera du soleil. Avant qu'elle ne commence à se boursoufler, à fumer, à se faire des cheveux, rentre vite t'occuper de ta rose. C'est le plus important, même s'il lui arrive de se montrer capricieuse et décevante (chez nous, on nous avait annoncé il y a deux ans une nouvelle variété, belle comme un printemps ; pour le moment nous en avons surtout vu les épines)…

 Encore un mot, petit prince. Si tu réussis à dépanner Philae, notre explorateur-en-chef du système solaire, M. Francis Rocard, sera comblé. La comète-iceberg Tchouri le passionne. D'autant plus que son père, Michel, qui fut premier ministre, est aujourd'hui notre ambassadeur aux deux Pôles. Où, tu t'en souviens, les allumeurs de réverbère mènent des vies d'oisiveté et de nonchalance, car ils ne travaillent que deux fois par an…


12 novembre 2014

N° 131 - Les guignolets de l'info

Avant-propos : Les "mots parallèles" sont rarement sérieux… Celui-ci peut sans doute être appelé une "pochade". En effet, d'après wikipédia, "en littérature (sic) ce terme s'emploie pour qualifier une œuvre en général burlesque, brève et écrite rapidement. Il semble être attesté en premier en 1800 avec ce sens qui le rattache à pochard et poissard, personnages vulgaires et burlesques du vaudeville". A la bonne vôtre !

J'ai entendu à la télé Monsieur Hollande se vanter d'avoir longtemps fait la tournée de tous les bistrots*. Et j'ai vu s'illuminer l'œil du journaliste qui l'interrogeait... [Bon Dieu, mais c'est bien sûr ! Coco, tu sais ce qu'on va faire la prochaine fois ? Pour qu'il rencontre les vrais gens, qu'il leur cause, comme ça, nature, décontract' ? Ecoute Coco : on le suit au bistrot, n'importe où. Il s'installe au comptoir. Il commande un petit blanc. Il trinque avec le patron. Des clients s'approchent. Vas-y, Coco : moteur !]

- Alors ça, Monsieur le Président, c'est une sacrée surprise !
- Bonjour, bonjour à tous. Vous savez, c'est une idée de TF1. Ils m'ont dit : "Il faut que vous preniez de la hauteur". Alors voilà, vous êtes "en direct du zinc présidentiel" !
- Vous reprendrez bien un kir, Monsieur Hollande ?
- Oui, merci. Mais pas royal, hein !
- Dommage... Parce que, moi, je vous l'aurais fait avec une roteuse de Hautvillers…
- Non, non ! Pas l'autre Weiler non plus. Et pendant que j'y suis, s'il vous plait, pas de sherry, pas de malaga, non pas de mal à Ga… Bon, alors, de quoi on parle ?
- Bah, Monsieur le Président, vous savez, dans le petit commerce, on étouffe : impôts par ci, impôts par là…
- Alors commençons comme ça. Va pour un pot, c'est ma tournée !
- Tchin, mon Président. Moi, c'est Marcel. Y a dix piges que je serche un goulot, alors je fais brève au comptoir !
- A la vôtre Marcel ! Un boulot, voilà, voilà ce qui importe aux Français. Tiens… un porto français, vous auriez ça, patron ?
- Dites, M'sieur Hollande, avez-vous envie de vous taper deux quinquennats ?
- Oh là, attendez, on n'en est pas là !... J'ai d'abord un quinquina à finir, vous savez…
- Vous en êtes où, Monsieur le Président, avec la GPA, les curés, tout ça ?...
- Ah, la GPA… Moi j'ai PS, ça me suffit. Avec les curés je peux m'entendre, sur saint-raphaël, cinzano…
- S'il vous plait, est-ce que vous avez parlé à Obama ? Parce que vous êtes plutôt mal tous les deux, à mi-mandat...
- J'y pense… Mais je vais commencer par l'ambassadeur. Then, the americano, bah, ma foi, quand il sera à 29° de safistaction, comme moi, tout en bas, rac et ric, hein, on verra…
- Oui, mais pendant ce temps là Merkel et Bruxelles nous mettent la pression !
- Là, je dis pas, oui, je reprendrais bien une pression… Eh, patron, allemande ou belge, c'est égal.
- M'sieur Hollande, les portiques de l'écotaxe, en Bretagne, on va vraiment les démonter ?
- Ah, oui, ça c'est fini les tocasques, euh, les motocasques, c'est fini. Franchement, j'en ai ras la bolée dubonnet rouge !
- Et vous seriez d'accord pour qu'on ne paie plus l'autoroute, le dimanche, pour aller en Normandie ?
- Euh, ça c'est plus dilécat. Resséflichez un peu : l'aller, ça va, mais au retour, le campari gratuit, bonjour les dégâts!
- A part ça votre courbe du chômage, elle va s'inverser quand ?
- Là, je vais vous dire, faut pas croire au pernod, au pernod, au père noël. Mais, whisky est vrai, oui ce qui est vrai, dès que je dis un mojito, un mot au JT, tout le monde ricard, euh, rit car je me suis vraiment planteur, euh, planté. Je reconnais, c'est de byrrh en byrrh... Je suis vraiment dans la mousse caipirinha, non, une mouscaille pire, il n'y a pas...
- Alors, vous allez mettre qui au gouvernement ? Martine Aubry ?
- Ça va pas, non ? Broc martini ? Un broc, là, t'éjagères… Mais téquila, hein, téquila pour me sortir des trucs pareils ? Tu serais pas la vodka du diable ? Patron, siouplait, donnez-moi un grand verre d'eau.
- Tout de suite, Monsieur le Président. Vous avez une préférence ? Badoit, perrier, eau de Vals ?
- …..
Merde, il est tombé ! Arrête, Coco, coupe. Appelle la prod. On a peut-être fait une connerie…




24 octobre 2014

N° 130 - Noël aux tisons


J'entends à la radio qu'on prépare déjà Noël. Et pourtant, c'est dans deux mois ! Remarquez, il y en a qui s'affairent déjà pour les élections de dans trois ans, alors pourquoi pas ?... 
En ville, ça y est, les guirlandes lumineuses sont accrochées aux becs de gaz. A Paris on a dressé un immense sapin place Vendôme. Un gigantesque conifère bien conique, en latex vert, lisse, souple et moelleux... Vous êtes tous au courant et vous l'avez vu sur Canal. Un engin pas banal, qui est tout de suite entré dans les annales. Certains ont flairé quelque analogie, non sans fondement, et demandé si c'était séant. Et voilà, deux jours plus tard l'énorme biroute est raplapla ! Elle git sur le pavé, près de chez Boucheron. Ce n'est plus qu'un bouche-trou pour échotiers en mal de copie…

Aucun rapport, du moins à première vue : une Californienne a eu envie de faire une surprise à son nouveau boy-friend. Elle a tenté de s'introduire chez lui, de nuit, par la cheminée. Allez savoir pourquoi... Elle avait peut-être entendu dire : "C'est un bellâtre", et voulu en avoir le cœur net. Ou bien elle tenait à prouver qu'elle ferait une bonne femme au foyer. En commençant par lui porter un des chenets au lit ? Bien sur, il n'y avait pas le feu, parce qu'en Californie, la braise, avec la pinède, tout ça, c'est interdit…


N'empêche, bien ramoner, ça demande du savoir-faire. C'est d'abord une question de gabarit. La belle est restée coincée à mi-chemin(ée). Il a fallu cinq heures aux firemen pour la sortir de là. Ils ont été obligés de lubrifier le conduit avec des litres et des litres de liquide-vaisselle. 



Petite page de publicité : "Pour la vaisselle, mieux que l'eau : L'Arbre Vert. C'est plus écolo !" (Le rapport, c'est là). La Mère Noël est sauvée. Avec le soufflet, elle fait des bulles…






Références, au besoin : http://www.leparisien.fr/paris-75/paris-l-oeuvre-de-paul-mccarthy-saccagee-18-10-2014-4223435.php#xtref=https%3A%2F%2Fwww.google.com%2F
http://www.francetvinfo.fr/monde/ameriques/etats-unis-elle-tente-de-rejoindre-son-ex-amant-et-reste-coincee-dans-la-cheminee_724639.html

9 octobre 2014

N° 129 - Ça marche !


J'ai entendu à la radio que la manif pour tous avait rassemblé cinq cent mille personnes. Sept fois plus que ne dit la police ! Justement, ce matin, au marché, je tombe sur Huguette, la dame qui a conduit la délégation de la paroisse. Elle se chamaille avec Léon, un instit retraité, laïcard comme pas deux. Il est en pleine démonstration :
-  "Huguette, réfléchis un peu : quand tu connais l'itinéraire, et la largeur des avenues, quand tu notes les heures de départ et d'arrivée des deux bouts du défilé, quand tu sais qu'il n'y a pas plus d'un marcheur au mètre carré – ou alors on se marche sur les pieds, tu peux me croire, j'en ai fait des manifs… - eh bien tu n'as pas besoin de l'âge du préfet de police pour calculer le nombre de manifestants !"
-  "Mais Léon, manif pour tous ça dit bien ce que ça veut dire : tous, ça fait beaucoup, beaucoup de monde…"
-  "Pas au point qu'il y ait sept piétons par mètre carré de bitume. C'est deux fois plus que dans le métro aux heures de pointe !"
-  "Tu sais, c'était très familial, il y avait beaucoup d'enfants, qui ne prennent pas tellement de place..."
-  "Tu n'essaies quand même pas de me faire avaler qu'il n'y avait que des pères de famille nombreuse, avec chacun six gamins sur les épaules?"
-  "Non bien sûr, mais tiens, par exemple, la dame qui marchait près de moi était venue avec son mari, ses deux filles, son beau-frère, euh, sa belle-mère, une cousine et son bébé. Ca fait sept ! Celle qui était de l'autre côté était venue, elle, avec, attends, sa bru, ses deux fils, deux petites-filles, une nièce et son enfant. Ca fait encore sept !"
-  "Huguette, tu te fous de moi ? Tu comptes tout le monde sept fois ?"
-  "Léon, tu n'es qu'un mécréant, tu ne crois à rien ! Moi, je te le dis : quand on a fait vivre Mathusalem jusqu'à 969 ans, quand on a nourri cinq mille personnes avec cinq pains et deux poissons, quand on a fait entrer tous les animaux du monde dans l'arche de Noé, on peut, oui, on peut faire tenir sept personnes sur un mètre carré, voilà, c'est tout."
-  "C'est n'importe quoi, vous seriez tous morts étouffés…"
-  "Léon, fais un effort : quand on dit cinq cent mille, c'est une façon de parler. Si je te disais: on était plus nombreux que les étoiles, comme les descendants d'Abraham, tu soupirerais en levant les yeux au ciel… Si je comptais, comme dans l'Apocalypse : ils étaient douze mille de la paroisse de Chamboissy, douze mille de la paroisse d'Orgenville, douze mille de Valmoulin, douze mille de Bougicourt…"
-  "Huguette, tu rigoles : il n'y a pas trois mille habitants à Bougicourt !"
-  "Ecoute Léon : douze mille, cinq cent mille, c'est pareil, c'est symbolique, c'est une manière de dire : beaucoup."
-  "Eh bien voilà ! CQFD…"
-  "Allez, au revoir Léon, il faut que je fasse mes courses."
-  "Hé, ho, Huguette, attends. Pour ta pénitence, tu me copieras sept fois les tables de multiplication !"



30 septembre 2014

N° 128 - La gazette


J'entends à la radio le revenant que-vous-savez parler du gaz de schiste. Avant -avant qu'il s'enfonce dans les ténèbres extérieures- il interdisait de chercher à savoir s'il y en avait au sous-sol. Question de principe, de principe de précaution. Avant, c'était un fervent partisan de la précaution, grand principe d'action, d'expertise, de vigilance et de responsabilité*! Maintenant -maintenant qu'il est revenu à la lumière- il exècre autant le principe que la précaution. Il est prêt à assumer les risques, à en prendre la responsabilité. Il n'a pas changé…

Maintenant, il voudrait qu'on explore les sédiments, qu'on en extirpe la moindre bulle, qu'on explose le millefeuille argilo-schisteux. Quitte à provoquer un schisme dans son clan, quitte à ce que la fracturation hydraulique en fracture la belle unité. Déjà qu'il y a pas mal d'eau dans le gaz… Ils ne sont pas tous très chauds pour qu'il fracture le schiste, après l'histoire des fausses factures : il a laissé une telle ardoise... Et puis, rien qu'à l'idée de le voir encore commander des sondages…

Certes, le gaz de schiste ne manque pas d'intérêt. On l'a vu à la télé : il suffit d'un seul tuyau pour le gaz de ville et l'eau courante ; le robinet distribue du Perrier qui fait pschitt, et sert aussi de chalumeau. Seuls des chichiteux se plaignent d'une vague odeur de shit.

Mais on aimerait bien savoir vers quoi notre homme s'embarque avec son plan-schiste. Parce qu'il y a schiste et schiste. Notre apprenti prospecteur devra d'abord distinguer le schiste métamorphique de celui qui ne l'est pas, car il n'y a rien à tirer du premier. Il ne doit pas non plus attendre grand-chose du monarchiste, ni de l'anarchiste, dont les gisements sont épars et insignifiants. On se doute qu'il ne tentera rien vers les formations de gauchiste, et qu'il laissera de côté les bancs de catéchiste, qui nécessitent une eau particulière. Par contre, s'il compte probablement sur un succès avec le machiste et le fétichiste, il se fait peut-être des illusions sur ce qu'il obtiendra du fasciste, qui, en France, est fortement sujet au métamorphisme. Les réserves du vichyste sont d'ailleurs résiduelles et celles du putschiste présentent des risques d'explosion. Quant au masochiste, qu'on trouve plutôt dans les tréfonds de Hollande, il est déjà complètement lessivé…

De son côté, en Syrie, Obama a fait bombarder un complexe gazier. Là-bas, c'est complexe. Si complexe qu'il faut être au moins prophète pour dire si c'est du gaz de chiite !..






* Voir: http://discours.vie-publique.fr/notices/077003284.html. Discours de clôture du Grenelle de l'environnement, 25/10/2007.

6 septembre 2014

N° 127 - Rouleaux impériaux


J'entends à la radio que les Japonais pourraient se trouver rapidement au bout du rouleau quand surviendront de nouveaux séismes. Au point que le gouvernement les conjure de stocker du papier toilette, dont les manufactures sont malencontreusement situées dans une région particulièrement exposée, celle de Shizuoka-Kakegawa. J'en conviens, ce nom fait sourire, mais je n'y suis pour rien. 

Entre nous, quand vous passez une heure dans le shinkansen de Shirakawa-Shi à Shinjuku, à feuilleter des mangas de Kakashi, avant de diner à Shibuya de sushis et de sashimis avec des gens d'Hitachi-Mitsubishi venus de Shikoku, l'idée vous vient que les Nippons sont un peu obsédés par la chose…
Mais revenons à leur principe des précautions avant de partir. J'imagine qu'une usine à bobiner du pq est moins difficile à remettre en route qu'un réacteur de Fukushima. Je n'y connais rien mais six mois de réserve stratégique devraient suffire. Ca va quand même chercher dans les six milliards de rouleaux ; en gros, deux cents par famille. Comme le papier japon est aussi résistant qu'il est fin, plus serait excessif. Malgré tout, une fois que c'est entassé dans le wc d'une ikkodate ou d'un apato standard, on ne sait plus en ouvrir la porte (car celle-là n'est pas coulissante). Aussi le MITI recommande de s'équiper également de toilettes portables (ce ne sont que de grands sacs-poubelle dans lesquelles on s'introduit entièrement, hors la tête, après y avoir jeté une poignée de pastilles, une sorte de litière étudiée pour*).

Je dois dire que ceux qui connaissent un tant soit peu le Japon sont étonnés par ces informations. Ils soupçonnent qu'elles visent plutôt à procurer une bouffée d'air frais (?) à une industrie papetière asphyxiée par la crise et par le numérique. Le fait est que le premier motif de dépaysement et de ravissement d'un étranger venu découvrir le pays du soleil levant se niche dans ses commodités. Les cuvettes de la firme ToTo sont en effet des merveilles de technologie et de confort. 

Un petit tableau de bord fait corps avec le côté du siège. Son clavier, illustré de pictogrammes très explicites, permet d'abord de régler la température de la lunette. Puis d'actionner, en fin de session, jaillissant d'une petite buse rétractable, un court jet d'eau dont on ajuste à son goût aussi bien le débit, la puissance, la durée et l'orientation que la forme - en pointe, en éventail, en tulipe ou en spirale - tout comme le rythme et l'amplitude d'oscillation, la chaleur et le parfum. Le visiteur choisit aussi la musique douce propre à le soulager ou le fond sonore qui rend sa présence plus discrète. Les modèles les plus avancés proposent, à l'instar des stations de lavage de voiture, un léger ajout de mousse avant rinçage, une finition à la brosse rotative souple et, pour le séchage, un souffle délicat d'air chaud et pulsé.
Chacun le comprend, si l'on peut prendre plaisir à s'attarder dans de tels lieux d'aisance, le pq n'y a plus sa place. Sauf peut-être comme matériel de secours, avec la lampe-torche (!), dans l'éventualité d'une panne de courant. Provoquée par exemple par l'explosion des centrales nucléaires sous l'effet du tremblement de terre. Dans cette hypothèse, on ne sait ce qui pourrait s'avérer le plus judicieux : cinquante milliards de rouleaux, ou rien du tout…

Si jamais nous étions appelés, en catastrophe, à dépanner les Japonais dans le besoin, pourquoi ne pas donner là une destination utile aux pages de certains gros tirages ? Quoi qu'il en soit, je vous dis merci pour ce moment que vous avez perdu à me lire !

6 août 2014

N° 126 - Le Rat qui trouvait la vie duraille


Ou : la voracité des rats de nos cités


Un Rat, hôte des Rois, mais de peu de cervelle, 
Des ripailles du Louvre un jour se trouva saoul,
Las des bribes de pain, d'œuf ou de mortadelle,
Reliefs de festins à trois ou quatre sous
 

Balancés sous les buis d'indécente manière
A peine enveloppés de feuillets fort graisseux.
Bien que son ordinaire en fut des plus copieux
     Il rêvait de plus noble chère.

Avide de savoir s'il en va mieux aux champs
Il s'introduit un soir dans le sac d'un croquant
     Qui s'en retournait en Navarre.
Il s'en sauve au matin sur le quai d'une gare
     Détale sur le terre-plein
Suit un ruban de fer qui borne le chemin
Bondit de poutre en poutre au dessus de pierrailles
Entre sous terre enfin par un noir soupirail
Et s'engouffre tout droit dans une buse obscure.
Là, dans l'ombre, soudain, il donne contre un rat,
Un compère, accueillant, affable, gros et gras.
     Il lui conte son aventure
     Puis confesse humblement sa faim.
Messire Rat lui montre, au long du souterrain :
     "Voyez, l'ami, les fins serpents
     Qui de ce conduit sont les hôtes
Si longs qu'on ne saurait, tels qu'ils sont, côte à côte,
Dire s'ils ont la tête ou la queue au ponant.
La chair en est bien ferme et l'os de bon airain
Leur cuir tout bigarré semble de sucre d'orge
Et leur goût savoureux flattera votre gorge."
Là dessus, de concert, ils croquent, pleins d'entrain
     L'un le bleu
     L'autre le jaune et vert
     Quand un feu
     Un fulgurant éclair
Les foudroie à l'instant, morts, le poil hérissé.
Du rat finit ainsi la gourmande odyssée…

Mais un fracas terrible ébranle la vallée :
Deux vaisseaux monstrueux se heurtent, sont détruits,
Dans un sabbat de fer. Deux charrois empalés,
Aveuglés, sans boussole, après le court-circuit.

Petites causes, grands effets. Et lourdes charges…
Que n'ont-ils grignoté plutôt les quais trop larges ?
Cette fable nous dit qu'il faudrait faire loi
Qu'une fois assuré de la largeur d'un train
Un joueur de flutiau précédât le convoi.
Croyons-en le conseil des bourgeois d'Hamelin !





16 juillet 2014

N° 125 - Desserts "faits maison"

On continue dans le genre "jeux d'été" ?



J'entends à la radio que le puzzle des régions fait la navette entre les assemblées. Je l'avais dit : simplifier le millefeuille administratif, ça ne sera pas de la tarte ! Hollande pourrait bien l'avoir dans le baba, alors même que le pauvre, dont la cote est dans les choux, quête un regain de popularité...

 
   Il avait dit à Valls : "Vas-y, fonce, bâcle, à va comme je te pousse !". L'autre, rapide comme l'éclair, a tout de suite sorti son projet. Mais qu'on soit prudent ou bavard, oisif ou actif, on s'en moque à chaque nouvelle mouture ; on s'esclaffe ou tire dessus à boulets rouges. On prédit : c'est du flan et ça va ringardiser le président. Mais dans son refuge du Faubourg Saint Honoré, celui-ci s'en fout : "Me ringardiser, moi ? C'est un peu vache, ringardiser, non ?"

Alors Valls, pour éviter le micmac, arrondit les angles, patiemment dine ici avec un opposant, là tâte un récalcitrant, bref se met en quatre, car le temps presse. Mais il reste des cas à régler. Il y a la Creuse, que son cabinet, pour en sortir, a mise où ça n'intéresse personne. L'Alsace-Lorraine aussi, car la discussion à l'est - rude, elle - n'aboutit pas. Et la Bretagne, bien sûr. Quand ça passe mal sur la ligne Paris-Brest, on dit que ça couine à Manuel Valls. Tandis qu'Ayrault déplore l'hésitation de sa ville, flottante, indécise…

     Il y a derrière tout ça, on n'en fait pas mystère, un aspect financier. Il y a des régions qui ont de la galette, où l'on dépense, on douille, on gaspille sans lésiner. Où des ripous dignes de mépris font des profits, trop, le citoyen s'en doute. Mais pour les autres, c'est la question du cout qui prime.

     Les régions, certains s'en foutent, vous pensez bien… On le croit sans peine. Tenez, j'ai fait une petite enquête en banlieue. Un jeune beur s'est défilé, en me criant dans les oreillettes : "Salam, beau vioque !" Même chose avec un feuj : "Shalom, piti vié !" J'ai piqué un fard. C'est vrai qu'avec mon début de brioche, mes pompes à l'huile de phoque, mes jointures qui craquent, l'un dans l'autre j'ai peut-être un aspect de nonagénaire ?



P.S. Cette fois tu peux envoyer ta copie. Elle sera notée sur 40. Oui, 40 ! N'hésite pas à "charcuter" le texte...


27 juin 2014

N° 124 - Régime Crétois

Tu es en vacances, ou tu t'y prépares ? Alors, relax... Prends ce qui suit comme une sorte de jeu d'été, pas compliqué. Il y en a vingt-quatre à retrouver, pas plus, pas moins...


J'entends à la radio qu'une lichette de faux-beurre à l'oméga 3 serait plus néfaste à mon cholestérol qu'une jatte de crème fraiche d'Isigny* ! Comme beaucoup d'auditeurs lambda, je me sens un peu béta…

Le rituel de mon petit-déj n'a pas varié d'un iota depuis belle lurette. D'abord un enduit de margarine de un millimètre, à epsilon près, pour boucher les trous de la tartine. Puis une couche de confiture. Une bonne confiote haut de gamma la fraise... Là, ce n'est pas omicron près, tout dépend des fruits. Quand même, je suis raisonnable : le sigma des épaisseurs n'atteint pas le centimètre.

Mais les diététiciens, oups, ils l'ont** déconseillée ma noisette de margarine ! Ils ont mis ma noix zeta l'index… Tant pi. J'en fais phi. Après tout je suis encore en bon êta, en pleine possession de mes kappa cités, et solide comme un tau-rho, non ? Avec ma ligne je pourrais même faire du delta-plane ou de l'alpha-jet. Alors je ne vois pas pourquoi j'irais me mettre à nu chez je ne sais khi ou consulter un psi en thêta tête. Encore moins appeler ça mu tant que je ne suis pas au xi !




**Upsilon ?

21 mai 2014

N° 123 - Singin'…

Sur l'air de "Le roi Arthur avait trois fils"*


Elle administre la Justic', par Thémis,
Et ce n'est pas un mauvais choix, Taubira.
Ils voulaient la fair' chasser,
La virer, la limoger
Pour s'être abstenue de chanter**…

       Pour s'être abstenue de chanter, ohé ?     
       Pour s'être abstenue de chanter, ohé ?
       Pour crime de trahison
       Forfaiture ou désertion ?  
       Non : s'être abstenue de chanter !...

Un jour qu'une prima donna (on en a !)
Interprétait la Marseillaise (en fa dièse)
Fascinée par la diva
Eblouie, saisie d'émoi,
Elle est restée muette et sans voix.

          Il vaut sûr'ment mieux la boucler, ô gué !
          Il vaut sûr'ment mieux la boucler, ô gué !
          Que tout gâcher par un couac
          Se fair' siffler par la claque
          Quand on n'a pas fait la Star-Ac'…

Pourtant sa langue est bien pendue, on l'a vu,
Ell' ne la met pas dans sa poch', de gavroche.
Ell' discourt avec aisance,
Avec flamme et virulence
Et ne manque pas d'éloquence.

          Mais ell' n'est pas là pour chanter, OK ?
          Pas pour triompher au kara - oké
          Ni briller au hit-parade
          De ces bateleurs d'estrade
          Dont ell' subit les engueulades.

Ils l'ont traitée de tous les noms, de guenon,
En lui balançant des banan's, de Guyane.
Quand "y a bon" macho réac
Il vaut mieux être un macaque
Qu'une femme, ministre et black !...

          Par quoi donc Le Pen est-elle… choquée ?
          Qu'est-ce donc qui scandalisait… Copé ?
          Qu'elle ait chanté trop "mezzo",
          Ou qu'ell' soit Garde des Sceaux
          Au lieu d'être… gardée au zoo ?

                



**Si vous étiez en voyage, ou absorbé par vos travaux, ou si votre télé était en panne vous ignorez peut-être encore tout de cet épisode (lamentable…) de l'actualité politico-médiatique récente ? Vous pouvez vous mettre à jour sur http://www.liberation.fr/politiques/2014/05/12/taubira-la-marseillaise-et-le-karaoke_1015393.