31 août 2017

N° 189 - Temps de cochon




J'ai entendu à la radio qu'un tribunal administratif avait annulé l'interdiction des repas sans porc dans les cantines de Chalon-sur-Saône. J'ai entendu... puis je me suis demandé ce que j'avais compris. Je dois dire que le peu que j'ai retenu de mes études tient en quelques principes tels que : commencer par le commencement et bien lire l'énoncé ; ou en des règles simples comme : moins par moins égale plus.
Je reprends l'exercice. Soit : au début les repas à Chalon étaient sans porc. Puis un responsable les a interdits et le tribunal vient d'annuler cette interdiction. Conclusion : on revient à la situation initiale, on ne sert plus de porc dans les cantines de Chalon. CQFD.

J'ai eu l'occasion de parler de ça à mon ami Désiré, le mari de Léonor(1). Lui n'a pas fait beaucoup de maths au lycée, aussi c'est avec ménagement qu'il me dit que, à son sentiment, j'ai peut-être compris de travers(2). Sans doute même tout l'opposé de ce qu'il faudrait. Il m'explique : "Au début, contrairement à ce que tu crois, les repas n'étaient pas sans porc. Par contre il y avait des repas sans porc." Je saisis : "Je vois ! Certains jours on mangeait du porc, les autres non." Désiré demande : "Tu veux dire : les autres enfants ?"  Moi : "Non : les autres jours. Ceux qui ont été supprimés." Désiré rectifie : "On peut manger du porc et pas de porc tous les jours, en même temps." Moi : "Ah, en même temps... Encore les promesses de Macron... Autrement dit, par exemple, quand c'est cassoulet, on peut le garnir d'une saucisse de Toulouse et d'une croquette de poisson pané ?" Désiré, qui est extrêmement patient, s'échine(3) à préciser : "Excuse-moi, j'aurais dû dire : tu peux manger du porc ou pas de porc tous les jours, en même temps." Moi : "Comment ça, en même temps ?" Désiré : "Au même endroit si tu préfères : toi du porc, ton copain pas de porc, à la même table, en même temps." Moi : "Sauf si ça lui coupe l'appétit... En fait, moi, tu sais, je n'aime pas trop le porc. De toute façon je ne mange plus à la cantine."

Là, j'ai senti que je commençais à fatiguer Désiré. C'est sur un ton un peu sec qu'il m'a déclaré : "Ecoute, aujourd'hui, c'est comme ça : tu peux manger du porc et pas de porc, être et de gauche et de droite, être homme et femme ou tout ce que tu voudras, en même temps. Mais je te préviens, je te le dis franco(4), quand la cour européenne de justice aura contesté l'arrêt de cassation du jugement d'appel portant abrogation de l'annulation de l'interdiction de la suppression des menus de substitution sans porc, ne va pas me demander : qu'est ce qu'on mange ?"




1 Je vous les ai déjà présentés, il y a un peu moins de deux ans, au n° 153.
2 De porc, aurait ajouté Boby Lapointe.
3 Dito. 
4 Non, pas là Boby !







25 août 2017

N° 188 - Rentrée


J'entends à la radio que les ouvriers de GM&S sont revenus à l'usine. Pas au boulot, il n'y en a plus, mais à l'usine. Celle où ils pliaient de la tôle pour former des pièces d'auto, à La Souterraine, dans la Creuse.

Curieux nom, La Souterraine. Curieux aussi qu'on précise toujours : dans la Creuse... La Souterraine, dans la Creuse. Autant dire un trou, au fin fond du creux de la France profonde... Essayons de nous mettre à la place des étrangers, Chinois, Syldaves ou autres, qui pourraient être tentés de reprendre la boite. Ils s'aident probablement de google-traduction et ils comprennent quoi ? Que c'est une grotte, une caverne, un gouffre ?
Ils ont entendu parler de Lascaux, bien sûr, alors ils doivent s'imaginer des hommes de Cro-Magnon forgeant dans l'ombre, à coups de massue, des choses dessinées au noir de fumée sur la paroi... Pour eux, La Souterraine, dans la Creuse, cela doit grouiller d'araignées, de chauves-souris et de reptiles myopes comme des taupes. Comment cela pourrait-il les attirer ? Ils hésitent sans doute à investir dans des antres de troglodytes ou des boyaux de mine, à La Souterraine, dans la Creuse... Ils ont aussi peu envie de bosser à La Souterraine, dans la Creuse, que de passer des vacances dans un cul de basse-fosse humide ou des catacombes enténébrées. A la rigueur ils pourraient être tentés d'y forer un tunnel et d'y créer une nouvelle ligne de métro. Mais un métro, à La Souterraine, dans la Creuse, pour aller où ? Ils pourraient être séduits par un projet de galeries où enfouir pour l'éternité des déchets radioactifs HAVL(1). Mais ne verrait-on pas surgir de terre des zadistes, même à La Souterraine, dans la Creuse ?

Alors les GM&S n'ont plus trop le moral... Au début pourtant leurs pères fabriquaient des trottinettes dans la même usine(2). Des trottinettes avec lesquelles ils ont sans doute, eux, fait la course entre copains autour de la grande église de La Souterraine, dans la Creuse, et de sa fameuse crypte. Les trottinettes, ça marchait. Alors pourquoi pas, aujourd'hui, la tôlerie pour voiture ? On a bien ré-ouvert des usines à Le Creusot, dans la Saône-et-Loire...



(1) Déchets de Haute Activité à Vie Longue
(2) Voir le site : http://gms-industry.com