J'entends
à la radio le babillage exalté, le concert de congratulations dithyrambiques
qui prolongent à l'envi ces jours de liesse et d'ivresse que j'ai, bien sur,
comme des millions d'entre vous chers lecteurs, vécus à la télévision. Je ne
voudrais pas qu'on me taxât d'acariâtreté, ni qu'on me fît grief d'être de
ces rabat-joie, de ces trouble-fête, de ces pisse-vinaigre ou pisse-froid qui se
plaignent toujours que la mariée soit trop belle. Mais, quand-même, il y eut
plus d'un loupé inexcusable, plus d'un couac improbable, plus d'un incident stupéfiant
qui incitent à penser que, malgré les apparences, notre Emmanuel Monarc est bien
loin de tout contrôler...
Nous
avons tous vu ces deux brigadiers à motocyclette, habituellement chargés de
guider et sécuriser son convoi, se tamponner sous son nez et prendre un gadin
qui pourrait leur valoir d'être mutés à la garde républicaine !
Nous
avons vu les cracks de la patrouille de France, ces chevaliers du ciel, ces
Tanguy et Laverdure de nos forces aériennes, ces super-héros à qui l'on confierait
sans hésiter le manche à balai d'un Rafale lourd de missiles nucléaires, se
tromper de bouton-poussoir et de feu de Bengale !
Nous
avons vu Hugo Lloris, dit "no pasarán", le gardien vigilant et véloce, le garant de
l'inviolabilité du dernier carré du territoire, pour tout dire l'ultime rempart
de notre défense nationale, en livrer d'un orteil négligent la clé passe-partout
à un franc-tireur envahissant !
Nous
avons enfin vu le déluge s'abattre soudain des cieux moscovites et détremper
sur place les Bleus et l'Emmanuel, comme s'il n'était qu'un vulgaire président
normal de l'ancien temps. Nous avons alors mesuré, alors qu'un grand pébroc noir
se déployait immédiatement au dessus du tsar Vladimir, mais de lui seul, le
degré d'imprévision météorologique, d'impréparation et, disons le,
d'amateurisme de l'entourage de notre e-Monarc. "Gouverner, c'est pleuvoir"
confessait son devancier, qui avait suffisamment mouillé la chemise, le costard
et les fumantes pour qu'on lui prêtât l'oreille sur ce point. Emmanuel dégoulinait...
Parmi ses gardes affligés, ruisselant en silence, autour de lui rangés, il y avait
nécessairement le porteur de la fameuse mallette. Si quelque crise internationale,
fomentée peut-être par l'impavide Vladimir, avait alors nécessité de la sortir du sac, elle aurait
pris l'eau de toutes parts et notre arsenal dissuasif aurait fait un gros plouf...