Billets d'humœur à périodicité aléatoire, géométrie variable et sujets... à caution (destinés notamment au délassement des cruciverbistes invétérés).
14 décembre 2020
N° 252 - Tribut révérenciel
J'entends à la radio les mots que martèle un slameur de talent et les waouh de ses fans, qui aimeraient peut-être scander à leur tour :
Vade retro covid, virus pestilentiel !
Epargne-nous, Véran, ton débit torrentiel,
Tes chiffres inquiétants, précis et séquentiels,
Qui croissent chaque jour d'un pas incrémentiel
Et forment un graphique au galbe exponentiel
Toujours plus éloigné d'un tracé tangentiel...
Désertons sur le champ nos nids résidentiels
Négligeons, l'air de rien, les gestes prudentiels
Sans plus nous imposer le choix pénitentiel
D'éviter les endroits aux afflux démentiels
Et ne plus fréquenter que ceux, confidentiels,
Où l'on échappe encore au tout concurrentiel.
Résistons de pied ferme au tri différentiel
Entre le quotidien, sérieux et substantiel,
Et le facultatif d'ordre préférentiel :
Le rêve, les loisirs et l'événementiel.
Zappons, zappons ce mot, ce mot présidentiel
Mot fâcheux d'un laïus, blabla circonstanciel
Prononcé de là-haut en mode distanciel.
Vive Grand Corps Malade, homme providentiel,
Qui remet à l'honneur le bon référentiel
Pour qu'on désigne, enfin, ce qui est... essentiel*.
Ouais... Mais, en attendant, restons très, très prudents !
*Voir : https://www.youtube.com/watch?v=NencPkx7qgY
30 novembre 2020
N° 251 - Circuit court
J'entends à la radio que nous
n'aurons bientôt plus besoin d'aller ni chez le boucher ni au supermarché pour
acheter du beefsteak. Le louchebem1 commence d'ailleurs à se faire de
la bile. Non, non, je ne te parle pas de steaks végans tout en pousses de soja
et sang de betterave. Nous ferons de l'élevage nous-mêmes, à la maison. On s'en
inquiète grave, tu penses, dans les chaumières du Charolais comme dans les
bergeries de Haute-Provence... Parce que toute la filière est concernée,
chevillards et équarisseurs compris. Mais non, ne crains rien, nous n'aurons
pas à nous charger de ça. Et que nous n'ayons pas le moindre bout de terrain ni
même un jardin n'est pas un problème. Je te l'ai dit : nous ferons de l'élevage
à la maison. Eh bien... où tu veux : à la cave, dans le garage ou un coin de
placard. Mais qui te parle d'installer un clapier sous la télé ? Il n'est pas
question d'élever des animaux ! C'est fini, ça, de sacrifier de pauvres bêtes
pour les bouffer. Il s'agit d'élever de la viande, seulement de la viande. Et rien
que des bons morceaux, juste ce qu'il nous faut, au fur et à mesure des besoins.
Ca ne prend pas de place du tout.
Je crois que tu es déjà un peu au
courant des méga-burgers de viande cultivée ? Oui, la viande obtenue à partir de
cellules souches d'onglet ou de rumsteak, incubées et marinées dans du sérum de
fœtus de veau. D'accord, ça ne te fait pas trop envie, je te comprends. Tu
aimerais pouvoir au moins choisir la race du bœuf, l'âge du fœtus, tout ça...
Mais c'est déjà de l'histoire
ancienne, c'est dépassé. Maintenant tu n'auras plus aucun souci, ni de traçabilité
ni de maltraitance : tu vas élever toi-même des cellules prises sur tes propres
joues, avec un grand coton-tige, façon covid. Puis tu les laisses proliférer,
foisonner, pulluler dans un bouillon de sérum périmé, le tien tant qu'à faire.
Et quelques semaines plus tard, à table ! Tu dégustes ta joue, oui ta joue, en miroton,
aux carottes nouvelles et aux petits oignons. Bien sûr, une fois que tu t'es
fait la main, tu peux te grattouiller ailleurs, essayer ton jarret, ton dessus
de côte, ou ton gigot... Et proposer d'y goûter. Imagine un peu nos amis, Désiré,
Léonor, toute la bande2 qui vient diner... A qui tu demandes d'identifier
celui de tes abattis d'où provient ta daube. Un triomphe ! Evidemment ils veulent
tous s'y mettre. Et de soirée en soirée, ici nous partageons du Pamphile en
brochettes, là nous nous taillons des bavettes de Marinette. Halal, kasher ou
pas, ça n'est plus en question : nous nous entre-bidochons joyeusement dans les
plus conviviales des barbacchanales !
2. De vieilles connaissances, depuis les n° 146, 153...
3. Je n'invente rien (ou presque) : ce mode d'autoreplication comestible fait l'objet du projet "Ouroboros steak", du nom du serpent mythique égyptien qui se bouffe lui-même par la queue (option facultative).
17 novembre 2020
N° 250 - Pantouflage
Puis tu m'en as offert, un jour, en velours
Je suis à l'aise
Les pieds dans tes charentaises
Quand tu voudrais qu'on marche un peu alentour
Je t'entends bien mais à tes vœux reste sourd
J'suis trop à l'aise
Les pieds dans tes charentaises
Mes deux arpions
Au fond de tes chaussons...
Quand nos volets sont verrouillés, double-tour
Quand près du feu tu baiss' un peu l'abat-jour
J'suis trop à l'aise
Les pieds dans tes charentaises
Mes deux arpions
Au fond de tes chaussons...
La vie vaut bien d'être vécue sans qu'on courre
Mêm' confinés en attendant les beaux jours
Prenons nos aises
Restons entre parenthèses
A la maison
Le temps d'une saison...
* C'est sur l'air de La javanaise, bien sûr, et enregistré sur https://youtu.be/cn3yp8QUiJ8.
13 novembre 2020
N° 249 - Le lion, l'âne et l'éléphant
Sous les traits d'un lion mort auquel, vil et mesquin,
Un âne, un bourricot minable et rancunier,
Décochait lâchement un dernier coup de pied (1).
Feu le ministre avait servi pendant la guerre,
Celle de Sécession, qui divisa naguère
Les états désunis du rêve américain :
Il était du côté du Nord, Républicain.
L'âne incarnait le Sud du coton, du tabac
Où le camp Démocrate armait le branlebas.
Du pouvoir fédéral ardent contestataire,
Attaché à ses droits de fier propriétaire
Un démocrate alors tenait à l'esclavage
Dont toute plantation tirait un avantage
(Dites, quels changements dans le panorama,
De cette époque-là... à Barack Obama !)
L'entêtement loyal, sûr et persévérant.
Un journal de New York en grand mal de copie
Avait fait circuler d'incroyables bobards :
Le président voulait s'accrocher à la barre
Prolonger son mandat, devenir... empereur ?
Echappés d'un grand zoo, y semant la terreur,
Des fauves se cachaient au cœur de Central Park !
L'humoriste alerté, finaud, chargea la barqueIllustrant un troupeau d'intrigants de tous poils
Dénigreurs du leader présumé déloyal
(On voit même caché sous une peau de lion
Un âne soupçonné d'en être le champion)
Bande qu'un éléphant mettait seul en déroute.
Le robuste animal, la légende l'ajoute,
En opposant son poids au complot des coquins
Symbolisait le grand parti Républicain.
Car l'homme qui répand les plus fausses nouvelles
Celui qui a recours aux plus grosses ficelles
En ne s'interdisant aucun moyen mafieux,
Qui de la Maison Blanche entend squatter les lieux
Plutôt que renoncer au poste et à ses pompes
Du totem du parti ne garde que... la trompe !
28 octobre 2020
N° 248 - D' ??
Tout à l'heure notre président va nous dire comment nous allons devoir vivre dans les semaines qui viennent. Alors, demain, vous vous direz peut-être "C'était le bon temps!" en écoutant cette complainte d'un homme (prétendument...) sauvage et solitaire accablé par le couvre-feu... Pour l'entendre en version originale, illustrée et chantée par l'auteur (!...) cliquez sur ce lien : https://youtu.be/kX4Y-WA0miM.
Je m'enhélicroqueville
Dès le crépuscule
La covid est là...
Je me confinaquemure
Sous la couverture
Ça n'en finit pas
Et la vie devient chagrine
Incoloroquine
La covid est là...
Oh là là
Qu'elle rend la vie dure
Oh là là
Dure dure là...
J'ai le couvre-feu-aux-fesses
Dès que le jour baisse
Je suis aux abois
Je suis ciné-pas-trop-phile
Lorsque dans la file
On est plus de trois
Rendu resto-bistro-phobe
Par l'ennemicrobe
Qui prospère là
J'ai la ciao-les-gastrite
De peur qu'on m'invite
Ou vienne chez moi...
Oh là là
Ca rend la vie dure
Oh là là
Dure dure là...
Je m'hydro-gel-alcoolise
Et m'emmasquebise
Et pars, quelquefois,
Comme un déambulomade
En dérobuscade
Tout au fond des bois
Loin des rencontrinopines
De copains copines
Mais... c'est pas la joie
Sans bisebécotiller
Ni cajolouiller
Le moindre minois...
Oh là là
Qu'elle rend la vie dure
Oh là là
Cette covid ordure
Oh là là
Cette ordure là...
20 octobre 2020
N° 247 - Atterrés
Nous entendons tous à la radio, à
la télé, à la maison, comme au boulot sans doute, l'émotion, l'horreur soulevées
par l'assassinat du prof de Conflans. Nous les lisons dans nos journaux, nos
mails, nos messages. Je ne me vois pas reprendre ici le cours de mes rubriques
futiles comme si de rien n'était. Je n'ai évidemment aucun titre à écrire quoi
que ce soit sur le sujet. Si ce n'est le besoin de partager avec celles et ceux
qui lisent volontiers mes billets deux ou trois choses qui m'ont remué.
Une pancarte, vue sur BFMTV, brandie
sur la Place de la République : "Si Dieu existait, il aurait honte".
Oui, certainement, honte des fanatiques qui le trouvent à l'évidence trop
tolérant, trop coulant et qui décident de prendre les choses en main, de sévir
à sa place, de s'occuper eux-mêmes du jugement dernier. Honte des illuminés
qui, finalement, ne lui font pas confiance, ne le trouvent pas à la hauteur.
Cette pancarte, en s'adressant
directement à Dieu plutôt qu'à ses saints, est plus sévère encore que la
fameuse une de Charlie où le prophète se lamente : "C'est dur d'être aimé
par des cons"... Des cons d'extrémistes qui s'approprient ce qu'ils
appellent leur religion, en font carrément leur affaire, l'utilisent à leurs
fins. Car les hommes continuent à inventer les religions...
J'entends (toujours sur BFM,
depuis mon vélo d'appartement) le recteur de la mosquée de Lyon répéter avec
force qu'on ne peut pas se prétendre croyant et attenter à la vie, si l'on
croit la tenir de Dieu. Pour ma part je crois fermement à la vie (avec une
majuscule peut-être) si je ne crois plus guère en Dieu. Ou alors, je confonds
les deux ? La vie, on en est sûr ; et c'est à peu près tout... Il y a quelques
dizaines d'années j'ai relu par curiosité le credo que j'avais souvent récité.
Je ne pouvais plus souscrire à aucune de ses lignes (sauf celles que les
historiens confirment : "... a souffert sous Ponce Pilate, a été crucifié, est mort et a été enseveli"). Et
je me demande plus que jamais, pour m'en tenir aux religions d'ici, comment on
peut se réclamer de Moïse, de Jésus, de Mahomet ou de Luther, pourquoi pas de Joseph
Smith [1], et
s'affronter, se trucider, s'exterminer à l'occasion, au nom d'un seul et même
être, réputé suprême et bienveillant ?
[1] "Prophète"
fondateur des Mormons (16 millions de fidèles) voir https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_Smith.
29 septembre 2020
N° 246 - Régime salé
Lui a fait don de sa banane
Sa banane, c'est généreux,
Lui a fait don de sa banane
Sa banane, c'est généreux.
Y veill' comme le lait sur le feu
Il ne quitterait la banane
La banane jamais des yeux
Il ne quitterait la banane
La banane jamais des yeux.
Quand un jour des taches s'y propagent
Quand s'en recroqueville la queue
C'est qu'elle est mure la banane
La banane, c'est pas douteux,
C'est qu'elle est mure la banane
La banane, c'est pas juteux.
Pour le garde c'est vraiment dommage
Mais, pas le choix, c'est impérieux,
Il faut remplacer la banane
La banane qu'est trop dégueu
Il faut remplacer la banane
La banane qu'est trop dégueu.
Il sait qu'on garde au grenier un pagne
De Joséphine, un pas trop miteux.
Il y prélève une banane
Un' banan' des dessous fameux
Il y prélève une banane
Un' banan' des dessous fameux (3).
D'un papier collant il l'enrubanne
Et sur le mur la scotche au milieu
Juste au bon niveau la banane
La banane, c'est minutieux
Juste au bon niveau la banane
La banane, c'est minutieux (4).
La dame qui vient pour le ménage
Chaque lundi depuis sa banlieue
Recueille les vieilles bananes
Les banan's pour les loqueteux
Recueille les vieilles bananes
Les banan's pour les loqueteux.
Rois de la dèche et de la panade
Migrant, clochard ou chômeur sans boulot
Ils vont se flamber des bananes
A huit cents briques le kilo (5)
Ils vont se flamber des bananes
A huit cents briques le kilo...
4. La banane et le scotch sont à la charge du propriétaire et l’installation doit être impérativement placée à 1,72 m au-dessus du sol suivant un angle de 37 degrés.
5. A raison de 0.86 € pour un dollar et 150 g par banane, le calcul donne même 860 000 €/kg.
31 août 2020
N° 245 - Que d'ô, que d'ô...
Mais c'était fatal : France Ô, quand on a déjà la Une, la Deux, la Trois, la Cinq, c'est zéro, c'est nul ! De toutes façons, ça ne peut pas marcher avec un seul O. Tiens, Pamphile1, toi par exemple, tu connais le château d'Ô, en Normandie2 ? Non, bien sûr. Ce n'est même pas celui de la O de l'histoire3... C'est clair, aucune chance avec un seul O, même circonflexe. Quand on veut aguicher le client on ne fait pas les choses à moitié. Il fallait doubler l'Ô, la baptiser France ÔÔ cette chaine ou, tout bêtement, la ÔÔ.
1 Un vieil ami qu'on retrouve de temps en temps, depuis les n° 146, 153...
2 Le joli château Renaissance de la famille d'O (dont François d'O, mignon de Henri III) à Mortrée, dans l'Orne.
3 Celle du roman X de Pauline Réage.
4 C'est le nom wallon de cette commune francophone, à
20 km au sud de Bruxelles.
5 Toujours Secrétaire d'Etat chargé du Numérique.
3 août 2020
N° 244 - Mascotte ?
18 juillet 2020
N° 243 - CQFD !
25 juin 2020
N° 242 - Déconfi...serie
(En deux versions, sans le son ou avec : https://youtu.be/PFZSGStsfDU).
Ils avaient, ils avaient
Des Carambars à poignée
Pour nous seuls, pour nous seuls
Ils balançaient à la ronde
Des tapées de pralines
Des volées de Carambars
Pas question
Dans ces conditions
Qu'on se débine ou qu'on se débande...
Des Marshmallows élastiques
Ils lançaient, ils lançaient
Des Marshmallows ronds et noirs
Et nous seuls, et nous seuls
En avions plein les mirettes
Pas question
Dans ces conditions
Qu'on se débine ou qu'on se débande...
Des œufs Kinder à surprise
Ils lâchaient, ils lâchaient
Des œufs Kinder détonants
Et nous seuls, et nous seuls
De dragées, de valdas
Qui giclaient de ces Kinder
Pas question
Dans ces conditions
Qu'on se débine ou qu'on se débande...
En l'air comme des chouquettes
Ils jetaient, ils jetaient
Des chouquettes à fumée
Et nous seuls, et nous seuls
Ca nous faisait rire aux larmes
D'inhaler, d'inhaler
Les bouffées de ces chouquettes
Pas question
Dans ces conditions
Qu'on se débine ou qu'on se débande...
Seulement, seulement
Ce n'était pas ordinaire
Un moment sur l'estomac
Pas question
Dans ces conditions
Qu'avant longtemps on en redemande...
8 juin 2020
N° 241 - Derniers carats
Ils traquent les derniers diamants qui pourraient encore rester aux creux de la pierre. A la fin de la journée ils se hisseront dans la benne d'un camion rouillé qui les larguera près de la baraque où ils logent, à l'intérieur même de l'enceinte de la mine, en plein désert, dans cet environnement invivable. Comme on ne saurait les soumettre tous les soirs à une fouille complète et soupçonneuse, ils n'auront de permission de sortie que dans quelques semaines, ou quelques mois...