16 août 2022

N° 276 - Je chantais, ne vous déplaise...

J'entends à la radio que des bûcherons de la haute vallée d'Aspe y ont entendu chanter une cigale. A des altitudes où, de mémoire d'Aspois, aucune ne s'était jamais aventurée. Mais où l'audacieuse a dû cymbaliser en vain, y étant a priori encore seule de son espèce...

L'écho de son appel montagnard s'est en tout cas propagé aussitôt sur les ondes et sur la toile. Ainsi j'apprends là que les cigales mâles de Provence ne bruissent que par des températures de 22° à 35°, où la petite paroi ventrale qu'elles font vibrer pour attirer les belles a toute l'élasticité nécessaire. Je lis ici qu'on en a déjà entendu dans les forêts du Jura aussi bien qu'à Nantes et peut-être même en Normandie ! Le réchauffement climatique et la succession de canicules les poussent donc vers les cimes, ou plus au nord...

La migration générale qui s'esquisse va toucher toutes les espèces, marines comme terrestres. Mais où pourront bien se réfugier celles qui évoluent habituellement près des pôles ? Les grands cétacés des mers boréales s'en inquiètent certainement déjà. L'orque puis le béluga qui ont entrepris de remonter les méandres de la Seine, l'une jusqu'à Jumièges, l'autre au-delà de Gaillon après avoir traversé en douce tout le port de Rouen, étaient peut-être des éclaireurs, en mission de reconnaissance en eaux douces et tiédasses ?

Des sceptiques s'en amusent : ils blaguent sur le beluga que n'ont pas vu les gabelous, cherchent quel gloubi-boulga(1) aurait pu le faire débagouler ou composent des chansons de goguette sur des airs de boogaloo(2)... Mais des complotistes savent, eux, que Poutine équipe en Mer Noire des commandos de dauphins espions ou poseurs de mines. Aussi soupçonnent-ils l'orque et le béluga d'avoir été téléguidés depuis Mourmansk et la mer de Barents pour préparer un raid des auxiliaires de la marine russe contre nos bateaux mouches ou l'armada de barges qui ouvrira les J.O. dans deux ans. D'autres voient dans la façon dont on les a exfiltrés vite fait l'indice qu'il s'agissait plutôt de jeunes recrues mal entrainées de nos propres forces spéciales.

Quant aux anxieux ils s'inquiètent surtout de ce que les deux cétacés, dont les sonars sont exceptionnels, aient pu se trouver à ce point déboussolés. Devant l'altération avancée de leurs capacités cognitives ils redoutent les effets contagieux des eaux et des parages où ils ont vadrouillé. Aussi nous exhortent-ils à nous faire vacciner au plus tôt, après la grippe du pangolin et la variole du ouistiti, contre l'alzheimer du cachalot. N'ayez crainte d'oublier : doctolib vous adressera des rappels.



(1)  Pitance ordinaire du dinosaure de l'Ile aux enfants.

(2) Courant musical apparu aux États-Unis vers 1965 par fusion d’influences latino et afro-américaines, rendu populaire en France par Le Bougalou du loup-garou du Professeur Carlos.