Ou : la voracité des rats de nos
cités
Des ripailles du Louvre un jour se trouva saoul,
Las des bribes de pain, d'œuf ou de mortadelle,
Reliefs de festins à trois ou quatre sous
Balancés sous les buis d'indécente manière
A peine enveloppés de feuillets fort graisseux.
Bien que son ordinaire en fut des plus copieux
Il rêvait de plus noble
chère.
Avide de savoir s'il en va mieux
aux champs
Il s'introduit un soir dans le sac d'un croquant
Qui s'en retournait
en Navarre.
Il s'en sauve au matin sur le quai d'une gare
Détale sur le terre-plein
Bondit de poutre en poutre au dessus de pierrailles
Entre sous terre enfin par un noir soupirail
Là, dans l'ombre, soudain, il donne contre un rat,
Un compère, accueillant, affable, gros et gras.
Il lui conte son aventure
Puis confesse humblement sa faim.
Messire Rat lui montre, au long du souterrain :
"Voyez, l'ami, les fins serpents
Qui de ce conduit
sont les hôtes
Si longs qu'on ne saurait, tels qu'ils sont, côte à côte,
Dire s'ils ont la tête ou la queue au ponant.
Leur cuir tout bigarré semble de sucre d'orge
Et leur goût savoureux flattera votre gorge."
Là dessus, de concert, ils croquent, pleins d'entrain
L'un le bleu
L'autre le jaune et
vert
Quand un feu
Un fulgurant éclair
Les foudroie à l'instant, morts, le poil hérissé.
Du rat finit ainsi la gourmande odyssée…
Dans un sabbat de fer. Deux charrois empalés,
Aveuglés, sans boussole, après le court-circuit.
Petites causes, grands effets. Et lourdes
charges…
Que n'ont-ils grignoté plutôt les quais
trop larges ?
Cette fable nous dit qu'il faudrait
faire loi
Qu'une fois assuré de la
largeur d'un train
Un joueur de flutiau précédât le
convoi.
Croyons-en le conseil des
bourgeois d'Hamelin !