J'entends à la radio qu'il y a de plus en plus de loups en
France, peut-être déjà trois cents1. Et qui ne se contentent plus de
battre la montagne... Vous verrez, quand on reparlera du loup à Canteleu et à La
Colle2, comme jadis, on en verra la queue sur la route de Louviers, dans
la forêt de Saint-Leu et les vignes de Chanteloup. Et s'il entre dans Paris, il
retrouvera le chemin du Louvre !
Evidemment, il y a tous les ans des milliers de brebis en
moins… Panurge vous dirait, bien sûr, qu'elles sont assez bêtes pour se jeter d'elles-mêmes
dans la gueule du loup, à la queue-leu-leu et bouche-bée-bée. Quand la
faim fait sortir le loup du bois et qu'il s'en prend aux troupeaux, l'alpage est le théâtre d'épouvantables moutonnades. Un sacré gâchis de gigots, de
côtes découvertes et de laine vierge à tricoter ! Mais, que voulez-vous, c'est
la loi de la nature et des écosystèmes… Vous ne préférez tout de même pas voir nos
moutons mis en sureté dans des ZA de banlieue, alignés en batterie dans des halles
industrielles, comme dans l'usine à mille vaches de cet entrepreneur picard3
?
Alors, posons la question : pourquoi le loup bénéficie-t-il
d'un régime de faveur ?
Quand il a fallu défendre une autre ressource indispensable
à notre survie, la patate, on n'a pas hésité à exterminer le doryphore de façon
radicale. Sans qu'aucun apôtre de la biodiversité n'ait encore milité pour que
ce petit coléoptère aux élytres zébrés soit maintenant réintroduit dans nos
campagnes. En Afrique et en Asie, à Madagascar et même en Oklahoma, on
voit périodiquement d'immenses nuages de criquets fondre sur les pâturages et
les cultures. Cela ne s'est plus produit chez nous depuis qu'en Camargue, il y
a quatre siècles, une nuée de sauterelles dévora, parait-il, plus d'herbe en un
jour que quatre mille bœufs en un an4. Qui penserait à profiter du
réchauffement climatique pour réapprivoiser en France quelques essaims de
locustes migratrices ou de criquets pèlerins ?
Allons, soyons raisonnables et gardons le loup en captivité…
N'aspirons pas à revoir le loup-garou du clair de lune, ni la bête du Gévaudan,
ni aucun monstre maléfique ou autre animal terrifiant, par le Diable ou par
Dieu donné. C'est déjà trop que la "bête immonde" ait ressurgi…
1 "Interception"
du 12/1/2014 sur France Inter : Les
bergers malades du loup.
2 D'après
Wikipedia le nombre des toponymes relatifs au loup (leu en vieux français) témoigne de son importance dans la France d'antan. Canteleu (chant du loup) est
une commune de Seine-Maritime ; La Colle-sur-Loup se trouve dans les Alpes-Maritimes
; Louviers est dans L'Eure, Saint-Leu-la-Forêt dans le Val-d'Oise, Chanteloup-les-Vignes dans les Yvelines.
Et Louvre désignait un endroit hanté par
les loups.
3 Il s'agit d'un entrepreneur du BTP qui se lance dans
l'élevage industriel. Florian le fabuliste a pourtant prévenu : "Chacun
son métier, les vaches seront bien gardées".
4 Rapporté par l'historien F. E. de Mézeray (http://www.france-pittoresque.com/spip.php?article7255).