30 juillet 2013

N° 107 - Quo non ascendet ? *


(La clé des bouts-rimés de l'autre jour n'a échappé à personne et nul n'a osé insinuer qu'ils n'avaient ni rime ni raison, ni queue ni tête, puisqu'ils ils rimaient par les deux bouts... Quant à la raison, nique-ab, nique-ab, c'est plus discutable... Après cet exercice "littéraire", reprenons nos devoirs de vacances (déjà ?!) pour une petite révision de mathématiques).


J'entends à la radio M. Sapin faire, à sa manière, le point sur le pari de M. Hollande d'inverser la courbe du chômage : "Le retournement n’est pas là. Il y a un ralentissement. Le ralentissement c’est le moment qui précède le retournement de la courbe du chômage".

Vous le savez, ces gens là ne parlent jamais pour ne rien dire. C'est au trébuchet que leurs conseillers com' pèsent les mots qu'ils leur susurrent. Si M. Sapin préfère "retournement" à "inversion", c'est qu'il y a une raison. Et, chers lecteurs, vous qui avez le goût et le souci du mot juste, vous êtes sensibles à la nuance : deux courbes, l'une retournée, l'autre inversée, ne sont évidemment pas plus parallèles que les mots qui les désignent.

C'est au volant, sur la route des vacances, que nous avons entendu M. Sapin. Ce n'est pas un hasard s'il a causé GPS. Qui, en effet, oublierait de ralentir avant de faire demi-tour immédiatement ? M. Sapin prédit donc, l'air de rien, que la courbe du chômage va revenir à son point de départ. Etonnant, non ? Mais tout bien pesé, ce n'est peut-être pas plus facile à concevoir que l'inversion de M. Hollande…


On ne peut pas douter que le Président, soigneusement briffé par son staff, se réfère, lui, à la définition rigoureuse et mathématique de l'inversion géométrique. "Id est" la transformation qui fait correspondre à un point M de la courbe (du chômage en l'occurrence) un point M' de sa courbe inverse, à partir d'un pôle O (le pôle emploi ?) et d'une constante k, avec OM*OM' = k. Si vous n'avez qu'un vague souvenir de la chose le petit schéma ci-contre vous sera utile. L'intérêt qu'il y a à afficher la courbe inverse plutôt que la courbe d'origine saute immédiatement aux yeux!

Ce serait de la mauvaise foi de trouver la ficelle un peu grosse, ou de la médisance d'insinuer que le mot inversion a été choisi à la légère. Ce serait faire injure au Président d'imaginer qu'il anticipe seulement une inflexion, un franchissement graduel de la tangente, un passage progressif de courbe concave à contre-courbe convexe, sans que la ligne cesse, peut-être, ni pour autant, d'être ascendante... Ce serait indigne de supposer qu'il veut simplement nous faire rêver de douces ondulations, de sinuosités harmonieuses, de cambrures souples, de rondeurs modelées, de galbes bien balancés…

Mais je m'égare. Ce pauvre M. Hollande n'a pas la chance de M. Raffarin pour qui la ligne, fût-elle en forte pente, était toute droite. Lui n'a d'autre choix que de biaiser, louvoyer, tournailler autour du pot et distiller dans le serpentin de ses circonvolutions cérébrales des formules alambiquées qui lui permettent de finir par une pirouette. Il ne va quand même pas se risquer à déclarer, platement : "Le nombre de chômeurs va diminuer" ?





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* Jusqu'où ne montera-t-elle pas ? (Cf. les pages roses du dictionnaire, ou Nicolas Fouquet).

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