9 septembre 2025

N° 304 - Boom...


Netanyahu s’entête à raser tout Gaza et Poutine à pilonner l’Ukraine.

Je viens de lire "Jour de ressac" où Maylis de Kerangal dit en quelques lignes comment déjà, en 1944, un tapis de bombes fit du Havre "une chose vide de toute forme, une surface n’ayant pour seule continuité que sa destruction, une croute de gravats, et cela sans qu’il soit même possible de décider si l’on a affaire à des vestiges, ou si l’on se trouve face à une matière nouvelle, une substance inédite que la guerre a créée, corps plus ou moins compact de toits, de portes et d’escaliers, de murs aux fenêtres vides, fusion de pignons et de poutres, de matelas et de chevaux, de photographies et de machines à coudre, magma de faïences, de poussettes, de vélos et de pyjamas, lave de transistors et de chiens, purée d’autobus, de casquettes et de banderoles, pâte de choses humaines avec des morceaux d’humains dedans, salmigondis de passés qui, une fois tassé, hausserait le niveau de la ville de près d’un mètre".

Mais le mois dernier on a commémoré les deux bombes, deux seulement, qui pulvérisèrent Hiroshima puis Nagasaki il y a quatre-vingts ans, un an après Le Havre.

L’autre jour, à Cherbourg, nous avons visité la Cité de la Mer où, après avoir vu toutes sortes de bathyscaphes puis l’aquarium, nous avons pénétré dans le Redoutable, le premier sous-marin français à propulsion nucléaire. Mis en chantier il y a 60 ans - avant l’ère de l’ordinateur - désarmé il y en a 35, il est maintenant au sec dans une forme de radoub. 

On y suit d’étroites coursives couvertes du haut en bas d’un enchevêtrement de câbles et de tubes gris, de vannes et de manomètres. Puis on longe les deux rangées de huit silos verticaux où étaient tapis les missiles M20 à tête nucléaire. Dans l’audio-guide la voix d’un ancien commandant du navire souligne, avec un accent de fierté, que chacun de ces seize missiles était équivalent à cinquante bombes de Hiroshima. Là, dans ce vieux sous-marin de musée, huit cents fois Hiroshima…

Bien des progrès ont été faits depuis chez nous, et plus encore ailleurs. Aujourd’hui des milliers d’engins largement plus performants en termes de portée, de vitesse et de puissance sont embusqués un peu partout sur terre, ou sous la mer, entre les mains souvent de dictateurs inquiétants. Notre planète, qui risque de crever d’un réchauffement à petit feu, pourrait tout aussi bien être vitrifiée en un éclair. Peut-on encore compter sur l’effroi, sur la terreur que cela inspire pour y échapper ? Les plus vieux boomers, au moins, l’espèrent…

 


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