18 janvier 2017

N° 176 - L'expression de mes sentiments distingués




J'entends à la radio qu'écrire une belle carte de vœux au décor enneigé, puis la mettre sous enveloppe, passe maintenant pour des plus suranné. Tout est devenu électronique et virtuel. Aujourd'hui on courrielle, on publie un post, ou bien l'on passe par un système de message succinct. Vous qui êtes de mes disciples sur ce bloc-notes - grâce au protocole de transfert d'hypertexte sécurisé - vous le savez, je fais de mon mieux pour rester dans le coup. Sans me vanter, je crois me débrouiller à peu près, tant avec le matériel dur que le matériel mou. J'ai, au fil des années, ouvert mes fenêtres 7, 8, puis 10 sans trop de problèmes. Je suis plutôt à l'aise pour cheminer sur la toile d'araignée, même en fidélité sans fil. Certes, je n'ai pas encore créé ma page sur le livre des visages ni émis le moindre gazouillis sur mon élégant téléphone. Je dois aussi reconnaitre que je reste un peu embarrassé devant le dièse des étiquettes de hachis et la dent bleue de ma petite souris. Malgré cela - vous êtes nombreux à pouvoir en témoigner - je réussis à présenter mes vœux avec un point de puissance et à faire passer des images par le tu-tuyau.

Je me suis même astreint à m'initier au langage des messageries instantanées, comme "Quoi d'neuf". Et j'ai découvert avec quelle sensibilité, quelle délicatesse on peut, en sélectionnant avec soin quelques émoticônes et en se limitant à la quintessence du verbe, exprimer la variété des situations, l'intensité des émotions, la subtilité des états d'âme, cent fois mieux que des pages d'alexandrins ne parviendraient à le faire. Voyez plutôt l'exemple de ce vers fameux :


Je savoure aussi le raffinement qui permet d'émailler l'entretien, suivant le cas, d'un waouh joyeux ou d'un whoa admiratif. Si l'occasion s'en présente, j'éprouve une véritable jouissance à marquer mon étonnement par un woah surpris, ou mon ironie par un waow moqueur. La palette des nuances est sans limite : je fais mon miel d'une opportunité de placer ici un wow effaré, ou, au contraire, de glisser là un ouhaou consterné.

Et c'est ainsi ("Ah ! Que n'ai-je étudié plus tôt pour savoir tout cela !...") que je suis parvenu à un degré supérieur du langage, à un niveau qui me fait franchir la barrière des espèces puisqu'il ouvre enfin aux singes, à commencer par les babouins, la possibilité de communiquer avec moi. On vient en effet seulement de comprendre qu'ils produisent depuis toujours des vocalisations comparables aux voyelles et qu'ils les combinent aisément pour formuler toutes sortes de whaou, selon les circonstances*. "Ah ! Que cela est beau !..."
 



Lexique

Système de message succinct :      SMS
Disciples :                                           followers
Bloc-notes :                                        blog
Protocole de transfert d'hypertexte sécurisé :                 https
Matériel dur :                   hardware
Matériel mou :                 software
Fenêtres 10 :                     windows 10
Toile d'araignée :              web
Fidélité sans fil :                wireless fidelity (wifi)
Livre des visages :             facebook
Gazouillis :                          tweet
Elégant téléphone :          smartphone
Etiquette de hachis :        hashtag (exemple : #mots//)
Dent bleue :                       bluetooth
Point de puissance :         powerpoint
Tu-tuyau :                           Youtube
Quoi d'neuf  :                    what's up (WhatsApp)
Ah ! Que n'ai-je... :           Le bourgeois gentilhomme (Acte II, scène 5)


2 commentaires:

  1. Même si la maitrise de Pierre sur l'outil informatique n'est plus à démontrer,ce retour aux sources est rafraichissant.L'occasion aussi de rappeler le "mulot" de Jacquot et le "Face de bouc" de je ne sais plus qui.
    Pour les singes, il faudra hélas se dépêcher de comprendre ce qu'ils ont à nous dire avant leur disparition programmée sous peu, s'il faut en croire les dernières nouvelles (in "Le Monde" et "France Inter").

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    1. J'ai entendu ça aussi, Kajiga... Dans vingt ou trente ans, des sapajous qui font "wahou", il y en aura... walou !
      Au museum d'histoire naturelle, le dernier étage de la galerie de l'évolution est déjà trop petit...

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